• Camille Beauplan

    Camille Beauplan

  • © Föhn et Camille Beauplan (2021)

    © Föhn et Camille Beauplan (2021)

  • © Föhn et Camille Beauplan (2021)

    © Föhn et Camille Beauplan (2021)

Précédent Fermer Suivant

Camille Beauplan, artiste

Pour l’exposition collective « noyau », organisée par la plateforme curatoriale Föhn, Camille Beauplan présente « Sushis sur balise auto relevable, parking Leclerc, temps humide », jusqu’au 28 mars à Bordeaux. Nous lui avons posé nos questions à cette occasion.

Par Orlane Dos Santos, membre de Föhn.

________________

1. Tu travailles à partir de photos figurant l’environnement banal de l’être humain. Pourquoi ?

J’aime bien peindre des trucs nuls et médiocres parce que c’est beau et que nous sommes nuls. On essaie toujours de s’améliorer, de faire notre possible, mais ça ne marche pas. C’est ce qui est poétique et ce qui donne des situations à la fois surréalistes mais aussi complètement ancrées dans le réel. Ce que je peins, je ne le mets jamais en situation, c’est vraiment vrai. Il y a toujours une situation paradoxale et ambivalente, mais qui reste joyeuse. C’est une sorte de gentille critique. Ça peut être ironique mais je ne me positionne pas non plus comme quelqu’un de parfait, je suis aussi nulle que mes sujets. C’est cette recherche de déséquilibre qui est intéressante.

2. Comment gères-tu le décalage entre le ressenti instantané de tes photos et ensuite, le travail de peinture ? Ce décalage s’inscrit-il dans ta recherche de déséquilibre ?

C’est le décalage qui est génial. Le décalage se trouve dans ce que j’apporte d’émotif dans la peinture. Il y a des photos que je prends et que je peins de suite, je suis encore dans le ressenti de la scène. Mais parfois, les photos datent d’un an et je ne les peins que maintenant, comme c’est le cas pour la photo de ma fille dans une zone industrielle. Je lui ai fait un visage et des jambes rouges fluos parce que j’ai digéré la photo entre-temps. Avec le recul, elle avait l’air d’être irradiée par ce qu’il y avait autour, d’une façon solaire et complètement déconnectée de la réalité. J’ai traité le décalage par la couleur, mais si je l’avais peint juste après, je ne l’aurais pas fait.

3. Le duo papier-peint et peinture est une nouveauté dans ton travail. Quel a été le cheminement pour inclure ce dispositif dans ta démarche ?

Ce sont plusieurs facteurs qui se croisent. D’abord, j’ai de nombreuses photos dont beaucoup ne peuvent pas devenir des peintures par rapport à l’histoire de l’art, ou parce que c’est trop cliché, ou parce qu’on ne voit pas assez le sujet. Mais je garde en tête toutes ces photos quand je peins. J’écris aussi des poèmes que je voulais faire basculer dans l’art visuel parce que je suis moins à l’aise avec les mots.
D’un autre côté, en retapant une vieille maison que je viens d’acheter pour m’installer à Bègles, j’ai découvert plein de vieux papiers peints des années 1920 qui me sont restés en mémoire. Et puis, je viens d’un milieu populaire. Je suis rurale, et je veux que mon travail soit accessible, que les gens se sentent immergés.

4. Dans quelle ambiance veut nous immerger avec « Sushis sur balise auto relevable, parking Leclerc, temps humide », présenté à l’exposition « noyau » ?

Pour le papier peint, j’avais envie de quelque chose qui reflète la lumière, qui est en plastique et dont l’existence n’a aucun sens, qui ne sert vraiment à rien. Et en même temps, je voulais une ambiance de fin de soirée, de lever de soleil sur un parking de boîte de nuit avec une sensation de faim. Quelque chose de nul, relâché et artificiel, comme le goût de l’aspartame, comme la barquette de sushis.

5. Vas-tu poursuivre avec ce type de dispositif au salon de Montrouge où tu exposeras prochainement ?

Oui, et ce sera très immersif puisque j’aurai trois murs qui font 2m70 chacun, permettant très peu de recul. Le gisant « Grosse Sieste » sera sur l’un d’entre eux, sur un fond bleu mi-gai, mi-triste, aspirant la lumière.
La vision vient d’un jour où j’ai emmené ma fille dans un parc. Une des mamans avait une burqa noire qui aspirait complètement la lumière. C’était à la fois magnifique et terrifiant, comme une implosion. Je voulais ce même effet mais avec une autre couleur pour le gisant.
Ensuite, trois autres peintures ont été sélectionnées dont deux (« …ckson Pollock à IRM Paris XIII » et « Presque l’autonomie ») seront sur un papier peint issu d’une photo d’un paysage. C’est en fait une rivière avec une partie ombragée et le reflet de mon conjoint et de ma fille, qu’on ne voit pas distinctement. Un des tableaux sera juste au-dessus pour imiter son propre reflet dans la rivière.

  • Camille Beauplan

    Camille Beauplan

  • © Föhn et Camille Beauplan (2021)

    © Föhn et Camille Beauplan (2021)

  • © Föhn et Camille Beauplan (2021)

    © Föhn et Camille Beauplan (2021)