KNYSNA
BARBARA SCHROEDER
VERNISSAGE MARDI 14 JANVIER 2020 À 19H
EXPOSITION DU 14 JANVIER AU 16 FÉVRIER 2020
DÉVERNISSAGE – RENCONTRE AVEC L’ARTISTE ET LA COMMISSAIRE D’EXPOSITION SAMEDI 15 FÉVRIER À 11H
GALERIE TINBOX MOBILE
PLACE CAMILLE JULLIAN À BORDEAUX
barbaraschrœder.com
Dossier de presse
Visuel presse
KNYSNA OU LA MÉMOIRE D’UNE FORÊT CARBONISÉE
par Valérie Champigny
Grâce à la SAFFCA (Southern African Foundation For Contemporary Art) présidée et co-fondée par Pierre Lombart, Barbara Schrœder a été invitée en résidence artistique avec Christel Attewel, jeune artiste sud–africaine pendant le mois d’août 2019 sur le site de l’Entabeni Farm au sud-est de l’Afrique du Sud au bord de l’Océan Indien.
» Nous avons atteint ce site paradisiaque après une longue traversée du désert en voiture, à 1 800 kilomètres depuis Johannesburg. Après plusieurs jours de marche, nous comprenons qu’un drame s’est déroulé sur ces terres dont la nature était en train de se remettre tout doucement. L’incendie remonte au 7 juin 2017. Le plus grave que le pays n’ait jamais connu. De graves pertes en vies humaines et animales, la destruction des biens de plus de 600 personnes, et 20 000 hectares de forêt primaire anéantis, marquent le paysage dévasté avec un sol durablement endommagé par les fortes chaleurs. «
L’exposition » Knysna « , initiée par la commissaire d’exposition Nadia Russell Kissoon, présente les productions de l’artiste sur les terres brûlées de Knysna au cours de sa seconde résidence en Afrique du Sud. L’exposition s’inscrit dans le programme » Il faut cultiver notre jardin » de l’Agence Créative et se déroule du 14 janvier au 16 février dans la galerie Tinbox mobile, place Camille-Julian à Bordeaux. Cette exposition résonne particulièrement avec l’actualité des incendies qui ravagent les forêts d’Australie.
Barbara Schrœder a réalisé, suite à cette résidence, des sculptures » empreintes et empruntées aux arbres » moulées dans un ciment d’une apparence très noire pour immortaliser cette force vitale de la forêt primaire carbonisée, à la manière d’un mémorial. L’artiste a choisi de concentrer son attention sur les champignons lignicoles pour leur faculté de transformation et la part invisible, mystique que développe le réseau souterrain du mycélium. On y trouve une étrange empreinte en silicone qui ressemble à une grande oreille. Il s’agit de ce champignon saprophyte, le phellinus nigrolimitatus. Ces champignons sont les premiers dégradeurs de la matière organique et jouent donc un rôle essentiel de décomposeurs. Ils sont aussi appelés » langue de bœuf » en français ou Feuerschwamm » éponge de feu » en allemand). De ces formes organiques jaillit une clarté au milieu de la noirceur des écorces. La plasticienne crée un choc visuel, existentiel. Elle dit :
» Mon paysage de fossiles devient viscéral. «
Si la présence humaine est indirecte, les notions de résilience et de rédemption du vivant sont à prendre au sens large. (…) La noirceur, à l’image d’un Phœnix, oiseau de feu qui renait de ses cendres, nous plonge dans une énergie méditative profonde.
» Mon approche de la vie par la nature passe par l’intention absolue d’affronter la matière. C’est une liaison physique, instinctive, débarrassée de toute conceptualisation. «
Si Barbara Schrœder se défend de toute théorisation de son travail, on ne peut s’empêcher d’y lire des parentés artistiques sur différents aspects de sa démarche. On pense d’une part à Anselm Kiefer et à ses paysages urbains contemporains en déréliction où s’enchevêtrent blocs de béton et ferrailles tordues qui ont fait fonction de catharsis du trauma originel. Et puis, à travers cette volonté forte d’extraire la lumière au creux de l’obscurité, on pense bien évidemment à Pierre Soulages, mais aussi en raison d’une liberté af rmée dans le process de mise en œuvre. Après plus de 60 années d’expérimentations plastiques, Soulages nous explique :
» C’est ce que je fais qui m’apprend ce que je cherche… Pour un peintre, les problèmes qui se posent ne précèdent pas les solutions. Ils naissent de l’œuvre, avec elle. «
Barbara Schrœder aborde au travers de » Knysna » une réalité apocalyptique au sens propre bien plus large, c’est-à-dire qu’elle prend indirectement en charge les questionnements concernant l’anxiété climatologique de l’époque, mais la poétique toute en finesse qu’elle propose ne rajoute pas à l’effondrement. Tout au contraire, la démarche au-delà de la splendeur, de la précision et de la méticulosité des pièces exposées, invite le visiteur à prendre conscience d’une certaine renaissance possible de la nature, d’une force de re-création plus forte que les catastrophes qui résonnent en nous. (…) Au-delà de l’étonnant rapport à la matière d’une intensité plastique et visuelle, l’intention artistique de l’artiste est porteuse comme d’un principe actif, d’une énergie viscérale de mettre en focus une magie toute réelle qui s’opère devant nos yeux et avec laquelle la plasticienne fait corps. De la forêt carbonisée jaillissent les prémices d’une vie nouvelle qui nous guide pour franchir le mur de la collapsologie. On vit des temps sauvages, des temps d’incendie mais plus qu’une espérance, Barbara Schrœder, en chercheuse déterminée, ne travaille pas seulement à ouvrir notre regard, elle crée une œuvre qui voit.
Valérie Champigny
Extrait de l’article, » Barbara Schrœder, la création comme urgence d’une nécessité d’agir «
10/01/2020
Rue89Bordeaux
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L’exposition KYSNA de Barbara Schrœder s’inscrit dans le programme » Il faut cultiver notre jardin » de l’Agence Créative sous le commissariat de Nadia Russell Kissoon :
» Il faut cultiver notre jardin « 1 est une sculpture sociale2 qui explore des modes d’expressions transdisciplinaires pour une conscientisation environnementale. Ce projet met en relation des artistes, des scientifiques, des jardiniers, des chercheurs, des philosophes, des hackers, des activistes et des personnes aux cultures et parcours diverses. Ces modes de pensées pluriels en présence accordent une place prédominante à l’imaginaire, aux récits et aux utopies-pirates3. Ce projet permaculturel s’agence sous des formes sensibles – matérielles ou immatérielles – à travers des dialogues, des rencontres, des résidences d’artistes, des expositions, des jardins, des ateliers… » Il faut cultiver notre jardin » propose un rapport élargit à l’art afin qu’il propage une pensée écologiste dans différentes strates du quotidien et de la société dans l’optique d’envisager de nouvelles économies de vies » qui consistent à faire le plus possible avec et le moins possible contre les énergies en place » et de nouvelles manières d’être au monde. Il tente d’impulser dans les consciences un rapprochement symbiotique entre l’Homme et son environnement. Il se veut social, éthique, poétique et politique ; une écosophie qui invite chacun à une résistance douce et créative : jardiner.
1 Voltaire, Candide, « Il faut cultiver notre jardin », Chapitre 30
2 Sculpture Sociale, concept de Joseph Beuys élaboré dans les années 1970
3 TAZ, Zone autonome temporaire, Hakim Bey, 1997, Ed. L’Éclat