Bobby Sands est mort le 5 mai 1981 à 1 heure et 17 minutes du matin.
Bobby Sands est arrêté et condamné à 14 ans de prison pour possession d’armes à feu. Il commence le 1er mars 1981 une grève de la faim suivie par neuf autres prisonniers politiques membres de l’IRA (Armée Républicaine Irlandaise) et de l’INLA (Armée nationale de Libération irlandaise).
Leurs revendications : obtenir le statut de prisonniers politiques auquel ils ont droit. Ils mourront tous, les derniers dans la presque indifférence générale.
Ces épisodes qui pourraient évoquer une « histoire ancienne » rejoignent malheureusement la plus proche actualité. La Catalogne, aujourd’hui, réclame son indépendance comme d’autres états et citoyens de l’Europe, lassés de voir leur identité se diluer dans la « mondialisation ».
Le conflit entre Catholiques et Protestants, les partisans de l’indépendance et du maintien dans la couronne rappelle l’histoire passée de la Grande-Bretagne et du clivage actuel entre partisans et opposants au Brexit.
L’Irlande du Nord, terre la plus pauvre de l’Europe qui a fourni les contingents de travailleurs à la première révolution industrielle britannique et les déracinés qui ont construit l’Amérique au XIXe siècle rappelle la crise des migrants qui s’est installée durablement dans nos sociétés.
On pourrait évoquer aussi le clivage Nord-Sud, catholiques pauvres du Sud contre Protestants riches du Nord, à l’envers cette fois-ci. Conclure par l’immense respect qu’inspire ce peuple de déshérités et d’insoumis unis jusqu’au sacrifice de ses enfants pour écrire par la souffrance cette page d’éternité.
Yan Morvan est à l’époque photographe pigiste à l’agence de presse Sipa, une des trois grandes agences de presse photographique parisienne des années 80. Il a le profil du jeune reporter déterminé risque-tout qui convient à la situation d’émeutes qui règne en Irlande du Nord. Il est alors tout naturellement envoyé sur les affrontements de Londonderry en avril 1981. Il y restera trois semaines et y retourna plusieurs fois pendant cette même année.
« Ces semaines que j’ai vécu à Derry et Belfast, vivant avec les émeutiers de quartiers catholiques, photographiant la tension, le désespoir, la foi et le courage des Irlandais, utilisant l’appareil photographique comme d’une arme servant leur cause, me persuadèrent à tout jamais du bien-fondé du témoignage photographique comme instrument de mémoire, d’émotion, de réflexion, gages d’un monde libre et démocratique ».
Yan Morvan